Vendredi

Je commence à tourner en rond, seul à Nantes. Je ne connais plus personne, il n'y a que des touristes obèses ... C'est écoeurant. De gros beaufs en tongs et en T-shirt lycra marque de bière ou club de foot allemand ou banlieusard épousant les contours lipeux de leur énorme bide. Envie de meurtre, parfois. Le pire, c'est quand ils se baladent en famille, avec le peit Kévin qui a le crane rasé sur les tempes et en brosse au-dessus, plein de gel avec un bel anneau doré, la grosse mère, argneuse et trop cuite, qui a les cheveux rouges et un soutien-gorge qui dépasse, plein de dentelles dégueulasses et salopes, le père, l'air heureux comme un abruti qui a trouvé la recette du glaçon, tenant serré contre ses aiselles trempées un fille acnéique, anorexique et conne comme ses pieds ; on comprend presque les gens qui ont commandé un génocide ...

Je me suis posé sur une terrasse sur la place la plus hype de Nantes (no comment) : je sors un livre. Comme les tables sont très rapprochés et que ce lieu est assez courru par les gens qui veulent claquer leur SMIC ou plus en café, inévitablement se pose à côté de moi comme par hasard une fille que l'on peut sans hésitation qualifier de "pétasse".

Elle fait semblant de s'intéresser aux coutours extraordinaires de sa tasse pendant quelques minutes, puis, ne tenant plus, elle m'aborde et me demande ce que je lis. Je me retourne lentement, et je lui répond un peu sèchement, la voix grave :

"Le pavillon des Cancéreux, ... de Soljénitsyne. Pourquoi ?"

[gros blanc]

"Ah ? Et c'est bien ?"

[la fille sait qu'elle a perdu, mais elle fait de l'acharnement thérapeutique]

"Ca parle de cancéreux dans un hôpital dégueulasse soviétique de campagne, où les patients pourrissent à cause des traitements à base de rayon enrichis au plomb."

[fin de la conversation]

C'était le moment "je-joue-mon-connard" de la journée, et, pathétiquement, le meilleur ...