Vendredi

Je passe mes journées dans une sourde quiétude, rythmées par les cinq offices plus la messe quotidienne. Le reste du temps, je me promène dans les bois humides et sombres qui ceignent une partie de l'abbaye. Pas de lecture, pas de journaux, pas de radio, de TV, ni d'Internet. Seul. Et le sentiment d'être immense en même temps.
C'est une impression vertigineuse. Je me sens vide, épuisé de mon énergie, cassé, comme ivre devant tant de silence et de calme. L'agitation de Paris me manque. Je me console en mangeant du foie-gras à l'Armagnac. Ceci est bon, tout simplement. Mais cette tranquilité de vie me pèse. Je ne suis pas fait pour être moine. Ce n'est pas un problème de foi, c'est un problème de manière de vivre sa foi. Le problème n'est plus de sous-vivre mais de vivre hors la vie.

La foi peut transcender la religion, la religion ne peut pas transcender la foi.

Vivre en abbaye, c'est s'arroger tous les avantages d'une vie communautaire et les avantages d'une autarcie dictée par une loi divine que rien ne transgresse, ne peut transgresser, ne peut être transgressé. C'est trop facile, en un certain sens. Je préfère encore souffrir parfois, plus de ne plus jamais souffrir. Si l'Enfer, c'est les Autres, je les préfère pourtant encore à un Moi reproduit à la chaîne et appliqué sur l'Autre, l'Homme comme l'homme immuable et absolutisé, un Moi imparfait et imperfectible, englué dans un espace atemporalisé et religiosifié à l'extrême.

L'homme ne peut être l'Homme.

2 commentaires:

Boré a dit…

vivement la rentrée littéraire de M de St G.! :)
j'aime cette nouvelle sobriété

wishlistmaster a dit…

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